Traitement homoeopathique des maladies des organes de la respiration (1874)
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Traitement

 

Aco. nap. - Si le croup s'annonce par des prodromes, ces prodromes sont de nature à ne nous inspirer aucun doute sur le choix du médicament. Frissons bientôt suivis de chaleur et de fièvre, douleur de tête, fatigue dans les membres, courbature, accablement ; rougeur, tuméfaction des yeux, douleur dans l'arrière-gorge, sécheresse en avalant, rougeur et tuméfaction des amygdales, de la luette et du voile du palais, état fébrile marqué surtout par la chaleur de la peau, la sécheresse de la peau, la dureté et la  fréquence du pouls. Ce sont bien là les symptômes du début et avec Aconit seul on peut en triompher.

 

Si l'invasion est brusque, comme nous l'avons vu, de sept à onze heures du soir, sans avoir été annoncée par aucun symptôme précurseur, elle est toujours marquée par une petite toux sèche qui ressemble plutôt à une tussiculation, il y a gêne de la respiration, douleur au larynx, voix rauque. Chaleur et sécheresse de la peau, fréquence et dureté du pouls, et cet ensemble de symptômes réclame encore impérieusement Aconit.

 

Aconit est ici tellement spécifique que sous son influence la maladie ne poursuit pas sa marche envahissante. Les caractéristiques de ces cas sont la chaleur et la sécheresse de la peau, la fréquence et la dureté du pouls et, dans l'invasion subite, la toux sèche. Aconit n'est jamais plus puissant que contre cet ensemble de symptômes et aussi on ne. peut rien dire d'exagéré sur les bienfaits que l'on peut en attendre.

 

J'entends déjà des voix s'élever contre moi pour m'accuser de prétendre pouvoir arrêter dans son cours une maladie qui n'a pas encore donné le signe positif, matériel, anatomique qui la caractérise. Le caractère anatomique du croup est la production d'une fausse membrane ; cette fausse membrane est absente ; donc, ce n'était pas le croup que vous aviez à combattre, et si la maladie a paru enrayée dans sa marche, c'est qu'elle était de nature à n'avoir plus de chemin à faire, et qu'insignifiante par elle-même, elle devait s'arrêter tout à coup, d'elle-même. L'aconit n'y est pour rien.

 

L'objection est plus formidable en apparence qu'en réalité, et je n'hésite pas à répondre

 

Assurément, tout enfant qui, avec ou sans prodromes, se réveille au milieu de la nuit avec une toux sèche, un peu de gêne dans la respiration, la voix rauque, même avec chaleur sèche de la peau, fréquence et dureté du pouls, n'a pas le croup, et après l'avoir guéri de cet état morbide qui peut être plus ou moins passager, il y aurait folie à prétendre qu'on l'a guéri du croup. De telles assertions se réfutent d'elles-mêmes, mais nous avons d'autres raisons pour prétendre que le croup a été enrayé dans sa marche par Aconit.

 

- Quand règne une épidémie, la similitude des symptômes nous suffit pour admettre logiquement la similitude de l'affection. - Or, dans des épidémies de croup, et c'est sur ces faits que repose la valeur incontestable de notre affirmation, on a vu à côté d'enfants qui succombaient à l'asphyxie par les fausses membranes au milieu de tous les moyens thérapeutiques les plus incendiaires, d'autres enfants échapper par l'effet de l'aconit au développement des symptômes, le début ayant été le même dans les deux cas. Si dans le même milieu, sous l'influence de la même intoxication, deux états morbides se montrent à nous avec le même cortège de symptômes ; que l'un s'arrête, et que l'autre marche toujours, il faut bien admettre que l'un aura été modifié à son début et que l'autre sera resté abandonné à lui-même pour suivre ses périodes. Un fait, deux faits peuvent ne rien signifier, mais une masse de faits comme ceux que nous possédons, le nombre et l'autorité des praticiens qui affirment que dans le croup Aconit peut avoir à lui seul les honneurs de la guérison sont trop importants pour que de son autorité privée personne ne soit en droit de les contester et de s'inscrire contre.

 

Mais la maladie est générale, spéciale, spécifique. - Et depuis quand faudra-t-il renoncer à enrayer dans sa marche une maladie générale, spéciale, spécifique ? Les fièvres intermittentes, le chancre syphilitique, la fièvre typhoïde, le choléra épidémique, la coqueluche, ne constituent-elles pas des affections générales, spéciales, spécifiques et ne sont-elles pas tous les jours enrayées dans leur marche ? La thérapeutique serait un vain mot si par son intervention on ne pouvait jamais arriver à faire autre chose qu'à voir les maladies suivre leur cours. Trop de médecins se contentent de ce rôle passif ; au lieu de les encourager dans leur apathie, nous devons secouer leur torpeur en leur faisant observer qu'eux-mêmes, quand ils combattent une maladie spécifique par un remède spécifique, sont bien obligés de convenir que la maladie ne suit pas son cours.

 

Prétendre au-lit du malade que la maladie suit son cours, phrase banale qu'on répète tous les jours, ce n'est pas faire preuve d'habileté, c'est déclarer l'insuffisance de l’art.

 

Revenons au croup. Le croup ne débute pas par de fausses membranes ; la fausse membrane est le caractère anatomique du croup ; je ne le conteste pas, mais il faut ajouter le caractère final, et si, pour fournir la preuve de la nature des maladies, nous en sommes réduits à l'obligation de présenter la pièce anatomique qui porte avec elle la preuve de son caractère final, la médecine ne sera plus l'art de guérir, mais l'art de fournir des sujets à l'amphithéâtre.

 

Sans changer de nature, un travail morbide peut avoir ou n'avoir pas les mêmes résultats ; les mêmes symptômes chez des sujets atteints de la même affection peuvent être ici le prélude d'une mort prochaine et là peuvent soudainement faire place à la santé, suivant que le médecin s'est ou non rendu maître de la maladie ; ce sont là des aphorismes bien autrement encourageants que nous devons avoir toujours présents à la pensée, pour nous fortifier dans l'exercice de notre art.

 

La fausse membrane du croup est la lésion, c'est-à-dire le produit de la maladie, le résultat d'un travail pathologique qui s'opère dans le larynx, travail qui se traduit au dehors par des symptômes qui lui sont propres, spéciaux. Nous n'avons pas besoin d'attendre pour agir, de connaître la nature de la maladie, puisque les indications nous sont fournies par l'ensemble des symptômes apparents. Que faut-il pour que la fausse membrane du croup manque ? Il lui faut ce qu'il faut au chancre syphilitique pour l'empêcher de s'agrandir et d'étendre ses désordres ; ce qu'il faut à.la fièvre intermittente dite pernicieuse pour que le troisième accès ne tue pas : - son spécifique qui arrête le mal à son origine.

 

Le spécifique du croup, c'est l'Aconit. Je n'ai jamais manqué de donner aux mères de famille le conseil d'avoir toujours sous la main de l'Aconit pour en donner à leurs enfants, avant la visite du médecin, toutes les fois qu'ils se réveillent au milieu de la nuit avec les symptômes précités ; je ne leur dis pas : Vous aurez guéri le croup ; je leur dis ce qui est vrai : Si l'indisposition n'a pas de racine, l' Aconit aura pu être inutile, il n'aura pas pu être nuisible, et si ça devait être le croup, vous avez la chance d'arrêter le mal à son origine ; et par la satisfaction que les mères de famille m'ont souvent témoigné, il m'a été prouvé bien des fois que j'avais eu raison d'en agir ainsi.

 

Devant un ensemble de symptômes nous n'avons pas à disserter sur ce qui pourra s'en suivre ; pour arriver à cette connaissance il nous faudrait abandonner la maladie à elle-même, ce qu'il faut éviter autant que possible. Notre mission est de guérir et pour guérir sûrement une maladie quelconque, le vrai moyen est d'effacer au plus vite les premiers symptômes par lesquels elle se manifeste à notre observation. Toute autre préoccupation est stérile, dangereuse, parce qu'elle fait perdre du temps et que le temps perdu au début de la maladie est souvent irréparable.

 

En résumé, au début du croup et le plus vite possible, aussitôt que la plus légère modification pathologique de la voix et de la toux autorise une certaine inquiétude, je prescris Aconit et tant que l'appareil phlegmasique est évident ; chaleur, rougeur, douleur et fièvre. Je sollicite qu'on insiste avec confiance sur ce médicament, le salut est à ce prix.

 

Spongia. - Après avoir insisté convenablement sur Aconit, et dans les faits de ma pratique le temps convenable pour voir se réaliser les bienfaits de l'Aconit donné en solution d'heure en heure après les premières cuillerées administrées à cinq ou dix minutes d'intervalle, n'a jamais été au delà de six heures. Dès que la sécheresse de la peau fait place à une douce moiteur, le temps d'Aconit est passé, on perdrait son temps à attendre davantage.

 

Spongia est alors le médicament auquel il faut avoir recours dans le plus grand nombre de cas, à la condition que les bruits soient secs au lieu d'être humides. Je signale tout de suite le caractéristique parce qu'il est de nature à frapper le premier et qu'il importe par-dessus tout, pour le succès, d'en tenir sérieusement compte. Si les bruits étaient humides, c'est à Hepar. sulph. qu'il faudrait inévitablement et tout de suite donner la préférence.

 

La toux de Spongia est donc sèche, très sèche, enrouée, retentissante et criarde ; on ne peut l'oublier quand on l'a entendue une fois ; on dirait ou une scie qui traverse péniblement du bois très-dur, la toux correspondant au mord de la scie, ou le chant du coq.

 

L'aconit en rappelant à la peau une douce transpiration a ralenti aussi le mouvement fébrile et modéré l'accélération de la respiration, mais il reste à faire, après cet adoucissement ; la respiration n'en est pas moins laborieuse, bruyante, rude et sifflante, l'enfant renverse sa tête en arrière comme pour faciliter l'entrée de l'air dans la poitrine, les accès de suffocation n'en surviennent pas moins de temps en temps,. et dans l'intervalle des paroxysmes la toux conserve son timbre caractéristique.

 

Devant cet ensemble de symptômes, quand l'exaspération a lieu surtout le soir, c'est Spongia qui répond le mieux à la situation et sans hésitation c'est à lui, et à lui seul, qu'il faut recourir. Ne nous préoccupons pas de la fausse membrane dont la préparation n'est que trop évidente ; pour la prévenir et pour en suspendre le développement, le plus pressé est d'arrêter le travail morbide qui s'opère dans le larynx. Or, pour arrêter ce travail morbide, il n'est pas de remède ni plus sûr ni plus prompt que celui qui recouvre le mieux la totalité des symptômes et dans l'état c'est Spongia qui satisfait le mieux à toutes les conditions.

 

En donnant à ses indications thérapeutiques un autre point d'appui que la similitude parfaite entre les phénomènes apparents de la maladie et les symptômes du médicament, on fait toujours fausse route et l'on court précisément au-devant du danger que l'on se propose de prévenir. Les fausses membranes ne sont pas encore formées, le moment de nous occuper d'elles n'est pas venu ; il viendra plus tard et pour les combattre dans leur origine et dans leur propagation, comme aussi pour en provoquer l'expulsion, nous trouverons ailleurs des ressources.

 

Hepar sulph. - Non moins précieux que Spongia mais dans une forme différente qui peut se présenter d'emblée ou ne venir qu'après la sécheresse caractéristique de Spongia. La toux croupale est accompagnée d'un ronflement dans la poitrine, qui est cause que l'enfant s'épuise à faire des efforts impuissants pour détacher des crachats qui lui semblent être la cause de la gêne de la respiration. La respiration est accélérée, sifflante, haute et suspirieuse. ; la difficulté de respirer devient si grande que les enfants s'arrachent les vêtements de la poitrine et saisissent leur cou comme pour éloigner l'objet qui les suffoque. La toux est pire le matin quand Spongia répond à l'aggravation du soir. L'expectoration insignifiante au début, blanche et écumeuse, se fait muqueuse et quoique toujours peu considérable devient plus abondante. Quelquefois, des fausses membranes, dénommées justement membranes croupales, sont rejetées au milieu de paroxysmes violents.

 

C'est le moment d'Hepar sulph. Les effets de l'arrêt de la respiration n'ont jamais été plus manifestes, le désespoir du malade est horrible à voir, ses angoisses sont si cruelles qu'il est impossible de ne pas les partager. Hepar sulph. manifeste alors une puissance énorme contre la maladie générale et provoque le rejet des fausses membranes, avec cette différence que nous avons fait déjà pressentir, que, tandis que l'expulsion mécanique des fausses membranes par des vomitifs n'est suivie d'aucun soulagement, l'expulsion due à Hepar sulph. termine les scènes de désolation par la joie de la guérison. Cette fois la maladie générale a été combattue dans son principe par son spécifique, et les membranes croupales ne se reforment plus.

 

Le sulfure de chaux a été préconisé contre le croup bien avant l'origine de l'École homoeopathique et l'on peut se demander pourquoi dans une maladie aussi désespérante pour la thérapeutique ordinaire, on n'a pas au moins conservé un bon souvenir, dans les cas désespérés, d'un médicament que des médecins recommandables de tous pays avaient signalé à l'attention de leurs confrères comme pouvant faire revenir de la mort à la vie. Je vais citer un fait parfaitement présent à mon esprit quoiqu'il se soit passé il y a longtemps, et ce fait donne l'explication de l'abandon du médicament, et, chose remarquable, justifiera en même temps tout le bien que. d'autres en avaient dit.

 

Je contai un jour à un médecin fort âgé, fort instruit et fort recommandable sous tous les rapports, une guérison de croup que je venais d'obtenir, dans la troisième période, par Hepar sulph. Après m'avoir bien écouté, ce praticien s'écria : Mais moi aussi j'ai employé le sulfure de chaux dans mon temps (et le temps était assez éloigné), et j'ai dû y renoncer, parce qu'aux symptômes déjà si terribles du croup, venaient immédiatement se surajouter des symptômes nouveaux, que la mort n'en était pas moins rapide et qu'à l'autopsie j'avais constaté des désordres plus graves et plus étendus que ceux du croup.

 

Je répondis que ces aggravations me prouvaient deux choses : l'action élective du médicament sur l'organe malade et le danger des doses de la vieille École ; qu'il aurait fallu garder l'une et se préserver de l'autre, en donnant à petites doses, à titre de curatif, le médicament qui, à hautes doses, s'était montré si offensif. Le vieux médecin réfléchit et ne me dit pas que j'avais tort.

 

En effet, c'est la loi, tout médicament est apte à produire la similitude du mal qu'il. est apte à guérir et vice versa.

 

Donc on aggravera non seulement l'état des malades, mais on le poussera à ses limites extrêmes toutes les fois qu'on leur administrera, à doses massives, le médicament qui est précisément en rapport homoeopathique avec lui.

 

Le hasard avait révélé à des médecins privilégiés les effets curatifs du sulfure de chaux dans le croup ; d'autres sont venus après eux qui ont compromis et le médicament et les malades, pour n'avoir pas su trouver la dose convenable.

 

Ce qui est arrivé pour le sulfure de chaux a dû nécessairement arriver pour mille autres médicaments qui sont tombés dans l'oubli et le mépris de certains praticiens, quand il n'en est pas moins possible et probablement moins vrai que les médecins qui les avaient exaltés étaient dans le vrai. La posologie n'est pas la thérapeutique, mais elle en est le complément et elle peut en être la ruine ou le triomphe.

 

Bromum. - Fausses membranes dans le larynx et la trachée ; respiration très difficile, bruyante, convulsive et rauque. Aphonie, anxiété extrême par manque d'air. Spasme du larynx, suffocation imminente, sifflement, râle laryngo-trachéal excessivement marqué, mais ce râle ne descend pas plus bas, ce qui le différencie de celui de Tart. emet. qui est plutôt dans les bronches. Chaleur à la face, brûlement des yeux, à la bouche, aux fosses nasales, à la poitrine ; toux aboyante par un chatouillement dans la gorge. Aggravation pendant la première partie de la nuit, amélioration après minuit. Sujets blonds à yeux bleus. - Dans ces conditions, Bromum ou Bromine ont fait des prodiges de guérison.

 

Sous l'influence du Bromure de potassium à hautes doses, il se manifeste au voile du palais, au pharynx et au larynx une espèce d'anesthésie qui persiste tant que dure le traitement.

 

Sur des pigeons soumis à l'action du Brome, il se forme de fausses membranes dans le larynx. En le faisant respirer à des chiens on l'a vu faire naître de fausses membranes.

 

Le Brome dilué, en contact avec les fausses membranes, commence par les durcir, et puis il en opère la désagrégation moléculaire.

 

Il ne faut demander au Brome que d'arrêter la formation de la fausse membrane. Ni le retour des accès de suffocation, ni l'état nerveux, ni la violence de la fièvre, ni l'imminence de l'asphyxie, ni la paralysie progressive partielle ou générale ne paraissent indiquer le Brome.

 

Le Brome possède le pouvoir désinfectant et détruit l'élément de contagion si fréquent dans les affections couenneuses, remplit l'indication de détruire la contagion. Or, un médicament qui détruit la source même du mal doit avoir grandes chances d'être un remède d'une indication très générale dans la maladie (Dr Ozanam)

 

Telles sont les acquisitions nouvelles de la science dans ces derniers temps sur le Brome, je les ai résumées en substance, heureux de rendre témoignage à un savant, membre distingué de notre École.

 

Mais Hering avait parlé bien longtemps avant que ces études, si méritantes qu'elles soient, eussent été faites. Cuique suum.

 

Hering avait, en ces termes, stéréotypé la pathogénésie du Brome : Inflammation du larynx, de la trachée et des bronches, avec des stries rougeâtres ou de rougeur foncée surtout là où la membrane du larynx entoure la glotte. - Exsudation de lymphe plastique dans le larynx et la trachée. - Enrouement et aphonie avec forte sensation d'excoriation et de raucité dans la gorge. Chatouillement dans le larynx excitant la toux. - Toux rauque, sèche, creuse. - Toux fatigante, ne permettant point de parler. - Toux avec accès de suffocation comme par la vapeur du soufre. - Toux spasmodique, d'un son croupal, sibilant, rauque, avec dyspnée et éternuement. - Respiration très-difficile.

 

Mon ami, le docteur Gillet, de Marseille, ne me saura pas mauvais gré de lui donner ici la preuve d'un bon souvenir, et il voudra bien se rappeler avec moi que nous avons guéri ensemble, avec quelques globules de Bromum 30 un enfant qui se mourait du vrai croup, rue Vieux-Chemin-de-la-Madeleine. Il y a plus de vingt-cinq ans de cela. En quelques heures tout danger fut écarté, et la convalescence ne fut troublée par aucune récidive.

 

Jodium ou Jodin. - Son caractéristique est l'absence ou l'insignifiance des phénomènes inflammatoires ; aussi ne réussit-il bien que chez les enfants à chair molle, flasque, ou de constitution scrofuleuse. Râle muqueux, laryngo-trachéal par suite de sécrétions abondantes. Les autres symptômes qui le rendent approprié sont : la pâleur du visage, le refroidissement du visage, la toux aphone, la difficulté de la respiration, la toux aggravée le matin. On a noté aussi, comme circonstance avantageuse, les cheveux bruns et les yeux noirs, en opposition avec Bromum qui se trouve plus en affinité avec les yeux bleus et les cheveux blonds.

 

Jodium ne doit jamais venir qu'après Spongia et Hepar.

 

Kali bich. - Je n'ai jamais eu l'occasion de l'employer, mais il a été préconisé dans le croup avec expectoration muqueuse, épaisse, filante. L'enrouement, l'exsudat fibrineux recouvrant le pharynx et envahissant la muqueuse de la gorge ; l'aggravation du matin, de bonne heure, ont encore été notés comme des signes particuliers de son indication.

 

Kaolin. - Voix rude à timbre métallique, bruit de râpe dans la respiration, toux suffocante.

 

Le Kaolin (terre de porcelaine) n'est pas un nouveau venu pour notre matière médicale. J'en ai entendu parler, il y a bien longtemps, par des confrères qui me disaient ou m'écrivaient s'en être bien trouvés dans des cas désespérés de vrai croup. Le témoignage le plus flatteur que je connaisse en sa faveur, est celui de Landesmann qui, après avoir publié des observations très-remarquables, ajoutait :

 

« En suite de ces expériences, je crois pouvoir compter le Kaolin au nombre des remèdes les plus efficaces contre le croup et en recommander l'emploi dans les cas les plus graves, lorsque tous les autres remèdes ont été vainement administrés.

 

Phosphor. - Très précieux dans le cours de la maladie, s'il survient une complication pulmonaire, ce qui est rare ; mais pour relever les forces et pour guérir l'enrouement qui subsiste quelquefois après le croup, on trouvera dans Phosphorus une ressource plus sûre que dans Carb. veg. que j ai pourtant donné dans ces cas avec un certain succès.

 

Tart. emet. - Respiration laborieuse, difficile, interceptée ; les bronches sont pleines de mucosités qui semblent à chaque instant devoir provoquer un accès de suffocation, sans que jamais un crachat parvienne à se détacher. Pas d'enrouement ; toux affreuse ayant le son un peu gras, par quintes fréquentes, se succédant rapidement, causée par des titillations dans la gorge. Toux suivie de vomissements ; on l'a vu réussir dans des cas où des vomissements manquaient, mais où il y avait plus ou moins de soulèvement d'estomac et une tendance continue aux vomissements.

 

Tar. emet. - Peut être donné presque au début de la maladie quand l'absence de l'enrouement et l'abondance des sécrétions bronchiques constituent les symptômes prédominants, et alors, en raison du début de la maladie, la fièvre persiste, le visage est coloré, et ce ne sont pas là des contre-indications ; mais le plus ordinairement la période qui appelle l'émétique a des caractères tout différents ; le visage est froid, bleuâtre, couvert de sueur froide, le pouls très-fréquent et la vitalité à moitié éteinte.

 

Lachesis. - Dans les cas les plus extrêmes, il a rendu des services signalés. Les symptômes qui doivent nous y faire recourir, même contre toute espérance, sont : l'enfant ne peut. absolument pas supporter autour du cou l'ombre même de quoi que ce soit ; l'exsudat fibrineux est apparent à la partie supérieure du larynx, le malade n'est jamais si mal qu'après avoir dormi. Cette aggravation de toutes les souffrances après le sommeil est vraiment un caractéristique précieux dont nous devons d'autant mieux nous souvenir qu'il ne se rencontre dans aucune pathogénésie et qu'elle est un renversement de l'habitude où nous sommes de trouver dans le sommeil un élément réparateur.

 

Le traitement local du croup n'est pas encore passé de mode, et laine sèche autour du cou, compresses chaudes et humides, éponges mouillées, frictions avec toutes les graisses que la superstition peut imaginer, trouvent encore des partisans. Je n'ai confiance dans aucune de ces pratiques dont le moindre inconvénient est de tourmenter les malades. Cependant je ferai une exception dans mes répugnances en faveur de l'éponge mouillée, ne fût-ce que pour me fixer sur le choix de Lachesis dans un cas douteux. Si l'éponge est supportée, Lachesis sera nul dans ses effets. Si elle est, au contraire, repoussée, avec horreur, Lachesis aura des chances de succès, et on fera bien de recourir à son emploi.

 

Sanguin canad. - Efficace dans toutes lés périodes du croup , la sanguinaire est le plus précieux remède que je connaisse dans le traitement du vrai croup. Elle est, dans cette terrible maladie, aussi spécifique que la quinine l'est dans la fièvre intermittente. Je l'ai employée un grand nombre de fois et jamais elle ne m'a fait défaut.

 

Un enfant de cinq ans se mourait du vrai croup ; après un certain temps perdu, je le trouvai complètement aphone, avec la toux caractéristique et le pouls à 132. Tout le voile du palais et le pharynx, à sa partie supérieure, étaient couverts d'un exsudat fibrineux. Dyspnée extrême, visage violacé, décomposition des traits. Je donnai la sanguinaire et quinze heures après, il y avait un amendement notable de tous les symptômes ; après quarante-huit heures, l'enfant était hors de tout danger 

 

Dans un travail comme celui-ci, entrepris pour l'instruction de tous, où les hommes ne sont rien, où les faits sont tout, je n'ai pas cru pouvoir me dispenser de citer des affirmations qu'il ne m'appartient pas de nier, quoique je les trouve stériles faute d'une individualisation convenable. Je rapporte donc in extenso un fait qui me paraît probant et qui, non-seulement se présente à nous sous l'autorité d'un nom recommandable, mais se trouve en tore confirmé par la pathogénésie du médicament.

 

– Ce fait n'est pas le seul dont le souvenir nous ait été conservé, le même médecin a rapporté plusieurs cas analogues de guérison de vrai croup par le même médicament.

 

C'est donc à noter et pour ne pas retomber dans les généralités qui paralysent tout, retenons ceci : l'exsudat fibrineux s'étalait visiblement au palais et dans l'arrière-gorge, ce qui constitue une individualité bien différente des cas où l'exsudat est localisé dans la cavité du larynx.

 

Voilà ce que j'avais à dire de plus essentiel à propos de la Sanguinaire du Canada dans le traitement du vrai croup. Je ne l'ai jamais employée, par conséquent mon jugement reste en suspens. Relevons à présent un détail qui peut paraître singulier.

 

Le docteur Hale, qui est partisan de l'École éclectique en ce sens qu'il cherche à en extraire ce qu'il y a de bon à la lueur de la loi homoeopathique, s'est laissé guider dans ces cas par la pratique du docteur Paine, un des chefs de l'École éclectique, et, comme lui, il a donné la sanguinaire dans le vinaigre, au lieu de la déposer dans l'eau, il a seulement diminué la dose et il a bien fait, au lieu de vingt grains dans quatre onces de vinaigre édulcoré par une once de sucre, il s'en est tenu à un grain et même moins dans deux onces de vinaigre. il n'en est pas moins vrai que le vinaigre a été maintenu comme véhicule et que là peut nous paraître choquant. A cela on a répondu que Hahnemann a bien donné des doses infinitésimales d'opium dans de la bière, chez des malades atteints de la fièvre scarlatine  

 

Je ne savais pas que Hahnemann eût choisi la bière pour véhicule de doses infinitésimales d'Opium, mais ce dont je me souviens très bien, c'est de lui avoir entendu dire, dans son cabinet de la rue de Milan, à Paris, à propos de cette thèse qu'il n'était pas si facile qu'on le supposait trop souvent d'antidoter un médicament homoeopathique. Pour que deux forces se neutralisent, disait-il, il faut qu'elles soient identiques, c'est à-dire de même nature, sans quoi les deux forces marcheront à côté l'une de l'autre sans se rencontrer. - Donnez mes globules dans l'urine, si vous voulez, ça m'est égal.

 

Je ne pense pas que personne prenne jamais au sérieux la boutade du Maître, mais elle contient un fond de vérité que nous ne pouvons pas nier. C'est leur nature, à part, sui generis, qui constitue la supériorité de nos préparations, l'objection tirée de leur petit volume n'est qu'une tactique indigne d'un esprit scientifique.

 

Cham. - Ce n'est pas là un remède que l'on puisse considérer comme usuel dans le croup et pourtant je connais au moins deux faits qui méritent d'être cités parce qu'ils sont très instructifs ; en deux occasions, l'enfant atteint de vrai croup et traité jusque-là sans succès par les différents médicaments homoeopathiques, en était au point que l'on désespérait de lui, lorsque par cette observation que l'enfant n'éprouvait un peu de soulagement que lorsqu'on le promenait dans les bras çà et là dans la chambre, on lui donna Chamomille, en raison de ce soulagement, et la guérison s'ensuivit immédiatement.

 

La Chamomille est le médicament privilégié de l'enfance, et dans la médecine des enfants, on ne risque jamais rien de recourir à son intervention ; il est presque sûr qu'on y gagne toujours quelque chose, mais il y avait plus dans les cas précités, l'enfant offrait au plus haut degré un caractéristique de Chamomille et cela suffit pour rendre compte du succès.

 

Preuve nouvelle de la nécessité de ne jamais se laisser absorber au lit du malade par la contemplation ni la dénomination de la maladie, ni par les symptômes locaux prédominants, il arrive très souvent que nous sommes conduits au choix du remède curatif par un symptôme en dehors de la localisation morbide ; la vie est une, la maladie est une, tous les cris des organes souffrants, c'est-­à-dire tous les symptômes sont unis entre eux par un lien commun, et c'est une étrange erreur que de vouloir les isoler arbitrairement pour donner à celui-ci plus de valeur qu'à celui-là.

 

Tous les symptômes sont utiles à noter, tous ont leur valeur, ce n'est que par leur réunion que l'on arrive à placer sous ses yeux tout le côté objectif de la maladie, le seul côté par lequel la maladie soit accessible à la thérapeutique ; mais toutes les fois que nous trouvons un symptôme saillant, constant, c'est-à-dire caractéristique du cas et que la matière médicale nous offre une réponse à ce symptôme par un effet pathogénétique saillant, constant, caractéristique, nous devons nous hâter de les opposer l'un à l'autre.

 

L'expérience nous a appris que c'est la voie la plus sûre d'atteindre à son origine la maladie générale, d'en suspendre les progrès et par conséquent de guérir. On est tout étonné, mais en même temps on est tout heureux de voir avec le symptôme caractéristique du cas, s'effacer tout le reste des symptômes. C'est ce qui est arrivé chez cet enfant guéri du croup par Chamomille. Tous les autres médicaments, même les médicaments homoeopathiques les mieux choisis, avaient échoué ; qu'on s'en souvienne, Chamomille arrive avec son caractéristique ; elle guérit.

 

Bellad. - Si l'affection traîne en longueur, si la toux congestionne la tête et la face, avec rougeur des yeux.

 

Ars. - Peut encore être tenté, dans les cas les plus extrêmes. Quand le corps est froid, entièrement épuisé et que le sujet semble prêt à mourir.


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