2010 Juillet/Août

Un cas de Lac Lupinum

de Sue Spurling

Lors de notre première rencontre, je m’étais sentie mal à l’aise et avais fait un pas en arrière en lui ouvrant la porte. S. était grand, mince, d’une allure souple et légère et avait d’épais cheveux gris qui lui arrivaient aux épaules. Il était jardinier de son métier mais se présentait comme guérisseur, plus particulièrement avec les animaux.

S. venait pour des problèmes familiaux concernant une fillette de huit ans qui avait été placée chez eux par l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE). Son comportement manipulateur et parfois extrêmement violent créait des tensions dans la famille. Elle avait été retirée de sa famille d’origine lorsqu’elle avait cinq ans et était depuis passée par plusieurs familles d’accueil. S. était inquiet des conséquences que cette situation avaient sur sa santé; il devenait dépressif.

Il commença à décrire la fillette, utilisant des métaphores animales: "Elle est comme un animal, un pivert qui n’arrête jamais, ça me rend fou. Elle ne peut pas arrêter. Elle est comme quelqu’un/quelque chose qui vit sous une haie, jouant dans la terre, comme un animal. Il n’y a aucune relation entre actions et conséquences. Même mes chiens ne lui font pas confiance; ils l’entraînent au bord de la terrasse et essaient de la pousser par-dessus bord. Elle a une énergie ‘maléfique’ qui pourrait tous nous tuer; je pense qu’elle m’a déjà tué.

Je me sens incompris. Avant, je lui faisais des câlins, lui lisait des histoires, mais elle racontait des mensonges sur moi, me faisait apparaître sous un mauvais jour. Une fois, elle a fait exprès de tomber par terre en rentrant d’une promenade en disant: "il a essayé de m’étrangler". Maintenant, je ne m’approche plus d’elle. Notre famille était déjà sous la surveillance constante de l’ASE et j’avais l’impression d’avoir à me justifier  continuellement à ma femme et à l’ASE, alors maintenant je me suis complètement éloigné d’elle. Je n’aime pas être sous les projecteurs. Parfois, je sens comme quelque chose de maléfique venant d’elle, comme si des toiles d’araignée remplissaient l’espace autour de moi. Ce n’est pas vraiment comme si elle prenait possession de moi mais plutôt comme une sensation malfaisante émanant d’elle.

Je me sens complètement à plat; j’ai perdu mon sens de l’humour. Ma tête est comme vide. Je me sens bien seulement quand je soigne les animaux; si je ne fais pas ça, je ne sais plus qui je suis. Je me sens confus, complètement assommé.

Des situations viennent de nulle part, elles arrivent sans que je m’en aperçoive, comme le jour où elle m’a accusé sans raisons. Je suis indigné par ça mais je me sens vulnérable aussi, car toute famille d’accueil est sous un contrôle très strict des assistantes sociales et de la police; vous devez faire très attention à ce que vous dites et faites, tout est noté.

Je me demande toujours ce qui m’attend lorsque je rentre chez moi. Elle m’a bien eu, elle m’a bien coincé. Je me dis que je devrais être capable de dépasser tout ça mais c’est si déroutant; j’essaie de me pas me laisser aller à la déprime. Elle n’est qu’une enfant, j’essaie d’être compréhensif. L’année dernière, je la regardais manger, mettant ses doigts dans une bouche pleine de nourriture, et ça m’a rendu tellement malade que j’ai vomi tout noir.

Psychiquement, je suis là sans y être, comme si je vivais deux vies différentes. Je n’ai plus de joie ni de sécurité. Je suis en colère et frustré, je n’aime pas ça. Je ne suis pas compétitif mais je n’aime pas perdre; j’aime avoir le contrôle de la situation. Je suis devenu dur, sauf avec les animaux, alors que j’étais tendre et attentionné.   J’adore travailler avec eux, les guérir; ils sont comme des miroirs. Je converse avec les animaux, j’ai un contact merveilleux avec eux.

Il y a deux ans, un ami est mort et le même jour, j’ai trouvé mon père mort dans son lit; il est mort dans son sommeil. Je suis content que ce soit moi qui l’ai trouvé mais j’ai eu beaucoup de chagrin quand il est mort; il me manque. Il était bon et généreux avec tout le monde. Ma mère est morte quand j’avais 27 ans et j’ai dû m’occuper de moi-même après sa mort."

Sommeil et rêves

"Quand je suis endormi, je suis plus présent dans mon corps.
Je fais des rêves fantasmagoriques, comme dans les films. Ils sont excitants et quelquefois prophétiques. Mes rêves sont souvent remplis de chevaux, de feux et de loups. Les loups sont des créatures spirituelles, très sincères. J’aime les gens qui sont sincères."

Sensibilité psychique

S. croît que notre énergie continue d’exister après notre mort. Un jour qu’il ‘guérissait’ une femme, un loup entra dans la pièce; c’était le grand-père de la femme. Cette sorte de choses lui arrive souvent. Il ressent les changements énergétiques d’une manière précise ; durant la visite d’une assistante sociale, par exemple: "elle se changea en loup et cela me mit sur mes gardes."

Son éducation lui a appris à respecter autrui, à connaître sa place pour ne pas se sentir honteux de soi-même.

Généralités et modalités

Il aime être dehors par tous les temps; il aime les orages, marcher sous la pluie et regarder le vent se déchaîner. Il n’est pas frileux et préfère le temps froid au chaud. Il s’habille de chemises  à col ouvert et n’est pas gêné par un travail physique dur.

Analyse et prescription

Son langage, ses rêves et son comportement ont des caractéristiques animales. Il est habituellement rapide et plein d’esprit mais il se sent maintenant lent et ‘à plat’.  Ses manières dénotent une forte autorité et une aversion à être défié, particulièrement par une fillette qu’il pense devoir être capable d’assumer. Tout cela le fait se sentir impotent et confus.

Trois aspects de notre rencontre ont retenu mon attention:
1- ma réaction initiale: nerveuse qui se changea en observation attentive.  Il y a une ‘qualité’ animale chez lui; il aime être dehors lorsqu’il y a une tempête, avec ses chiens.
2- Il travaille avec ‘les esprits’; ses rêves, ses capacités psychiques et la peur de la sensation ‘maléfique’ de la fillette.
3 – son profond respect pour son père et pour ce qu’il représentait: générosité et bonté pour les autres. Le chagrin d’avoir perdu son père.

Tout indiquait un remède du groupe des Lacs.

En lisant le livre de Farokh Master sur les Lacs, j’ai découvert que Lac lupinum est particulièrement marqué par la perte du père et a besoin d’authenticité et d’intégrité autour de lui.

Prescription: Lac lupinum IM   

S. ne prend pas le remède mais le tient simplement dans sa main, disant "c’est comme si j’étais bercé dans les bras de ma mère." A cause de sa capacité à percevoir sa propre situation, nous convenons qu’il peut prendre le remède de la manière qui lui semble la plus appropriée. Il apprécie le fait d’être responsable de ses actions.

Suivi

La situation de S. a connu une très nette amélioration, qui se poursuit toujours, deux ans plus tard. Il est beaucoup plus calme et arrive à gérer la situation avec la fillette d’une manière moins didactique. Leur relation s’est aussi améliorée, ce qui a abaissé les tensions dans le foyer.

 

Catégories:
Mots clés: dépression, mort du père, amour de la nature, incompris
Remèdes: Lac lupinum

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